Écrire est un
recueillement audacieux.
C'est
par la lecture que j'ai commencé à connaître et aimer le métier d'écrivain. À
travers leur passion, s'est dévoilée la mienne. L'écrivain est engagé de
manière à part dans l'existence. Il est le seul responsable. L'écrit exerce sur moi
un grand pouvoir. L'écriture me réconcilie, parfois, avec le réel. Quand elle
exprime la transmission et la traduction d’un univers singulier et
universel. Écrire est assourdissant. Comme d'autres, j’ai besoin de silence et
de solitude quand j’écris. Ce n’est pas tellement le ton ou le mot juste qui
importe vraiment, mais le mot « transmissible ».
L’art,
le texte, va bien au-delà des apparences. Il va là où on n’irait jamais
autrement dans la vie. Quand j’avais vingt ans, la passion, la folie, je
galvaudais ces mots ; je m’en servais comme d’une fleur au bout de mon
fusil, sans réaliser à quelle arme j’avais affaire, sans réaliser dans quelle
douleur il fallait sombrer pour vivre comme ça, dans la passion. Je ne suis pas
de celles qui montent aux barricades ; je suis celle que ça transperce, celle que ça atteint de plein fouet, celle qui
peine à comprendre la nature humaine, celle qui ne sera jamais tout à fait
copie conforme et qui ne pourra jamais naviguer sur un long fleuve tranquille. Ne pas
se laisser ronger par l’impuissance ramène à notre responsabilité, assumée dans le geste le
plus banal du quotidien. En écrivant je fais des choix, je pose des limites,
j’exprime une subjectivité, je circonscris ma liberté tout en tentant d’en
élargir les périmètres.
Avec
tous les accrocs et les méandres auxquels je me suis heurtée et mesurée, ma
langue s’est formée, ma voix s’est modulée, mon corps s’est arrondi. Ma parole
est singulière, dans le sens particulier du féminin. J’entends par là, qu’au-delà des différences, il y a l’exigence
du partage. Pour que nous soyons ensemble.