UNE ESTHÉTIQUE DE LA BONTÉ

Chroniques de libres pensées créées à partir d'une citation d'auteur
par Dyane Raymond

mercredi 6 juin 2012


La mort est une possibilité absolument certaine ; elle est la possibilité qui rend possible toute possibilité. Emmanuel Levinas

Pour Nathalie 
La question de responsabilité pose en même temps celle de la mort, car dans le regard que je porte sur autrui, est contenue, l'interdiction morale de le tuer, de l'abandonner et même de le négliger. La mort d’autrui est une proximité par rapport à soi.


Émotions, inquiétude dans l’inconnu ; la mort, dans ce qu’elle incarne de violence et d’humain dans la pensée, le matériau brut, la blessure, est présente dans chaque instant de l’existence. 
La violence se manifeste partout, tout le temps. Et je ne parle pas seulement de la vulgarité quotidienne qui nous environne, mais d’une violence contenue dans la voix, le dire, la mémoire qui m’habite, me déchire, me conduit vers la conscience. C’est pourquoi je crois que mort et bonté se touchent, presque indissociables, dans un rapprochement non seulement de sens mais d’essence.

En perdant pied, en ne cherchant plus à éviter le meilleur et le pire, ne sombrant dans nulle déréliction, je ne résiste pas, simplement, à l’inéluctable. Il ne se produit rien, rien de remarquable ; si ce n’est cela, cette mort : le sérieux sévère de la bonté, le rigoureux amour.
Se perdre enfin, séparé, abandonné à soi-même ; s’orienter non vers son anéantissement, mais vers la faille, la fêlure ouvrant sur un possible. Je n’entretiendrai nul espoir de lumière ou de renouveau, encore moins de pérennité. Une sensation peut-être se produira, un intangible.
Cela m’amène à penser au personnage de l’Implorante dans la sculpture intitulée L’Âge mûr de Camille Claudel ; à toute l’intensité contenue dans le creux de ces mains qui se perdent dans le vide : un chercher prise qui n’en trouvera pas. La pensée et l’agir de la sculpteure à travers son œuvre sont devenus un événement qui me concerne.
La mort dans la création se déplace du corps de l'artiste au corps de l'objet, dégage une odeur, a un poids, esquisse déjà l'aura de l'œuvre en l'éloignant de lui, d’elle. Je reprends cet objet, le fais mien, le re-crée.

Ce qui m’amène à reprendre la question de Kant : Que puis-je faire ? qu'ai-je le droit d'espérer ? Et à partir de là revenir à la réflexion amorcée avec le sérieux sévère de la bonté, sur le sens de l’engagement et de la foi, en tant qu'artiste notamment...