«Prendre charge d’une < chose > ou d’une < personne
> dans leur essence, c’est les aimer, les désirer. » Martin
Heidegger
C’est par la pensée que la bonté et de la liberté rejoignent la conscience, une pensée qui s’élabore aussi dans la parole et dans un
rapport à l’autre ; et qui accentue notre capacité
d’accueil et de don.
La responsabilité du don dans le travail de création est
également accordée à l’autre qui a la possibilité de répondre, de prendre la
parole et de faire exister l’œuvre au sein de la rencontre, de lui donner un sens
plutôt que de la laisser se perdre dans un non-retour.
Un don dans lequel la simplicité et la gravité du geste n’échappent pas à la personne qui le reçoit, et lui permettent à la
fois de le prendre et de le rendre.
Une transformation s’opère dans ce
processus, à la fois en soi et hors de soi ; le moi cesse d’être un centre
impénétrable pour devenir, au contraire, poreux, vidé peu à peu de son
étanchéité, de sa résistance à l’autre comme à lui-même. Car le lien avec
l’autre est en même temps le signe de la réconciliation de l’artiste avec
lui-même, qui dépasse alors ses résistances.
Ainsi l’œuvre de création en tant qu'acte de bonté révélerait la
possibilité de cet intérieur/extérieur, proche/lointain dans l’espace vide et
plénier de l’atelier, dans la responsabilité et la liberté du moi. Cet espace n’est pas conquis, mais bien
abandonné, délivré de la faute, dégagé du dire, ouvert à la singularité et à
l’universel.
C’est dans l’irréductibilité de
l’amour que la possibilité devient quelque chose de signifiant et que la
défaillance apparaît comme bonté.
L’amour, dont le mouvement consiste
à ouvrir des possibles, à dé-couvrir des formes, ne se réduit évidemment pas à une
suite d’élans affectifs et ne se limite pas non plus à un objet ou à un être ;
l’amour appelle la beauté et la signifiance. Appelle l’élégance.
Dans un processus de création, la
liberté de l’artiste est liée à l’agir et à l’œuvre.
Ce processus, qui se crée au sein
même de l’atelier, provoque divers mouvements, d’amour, de bonté, de doute, de
peur qui participent à la liberté de l’artiste et de son œuvre.
La vérité que nous exprimons est
l’accomplissement d’une pensée, d’une part de soi abandonnée à cette vérité, à
l’essence de la pensée, à l’engagement pris envers soi-même. C’est à partir de cet engagement
qu’amour, désir et bonté, par le pouvoir de la pensée, expriment ce
qu’Heidegger nomme « la force tranquille du possible » et instaurent « la
relation de l’homme à l’Être ».
Et cette relation à l’Être
s’inscrit dans le rapport qui nous lie à la nature et à l’art, c’est-à-dire à
la part sacrée l’existence.
Grand merci à Paul Grégoire pour cette image. |