UNE ESTHÉTIQUE DE LA BONTÉ

Chroniques de libres pensées créées à partir d'une citation d'auteur
par Dyane Raymond

mercredi 15 août 2012


«Prendre charge d’une < chose > ou d’une < personne > dans leur essence, c’est les aimer, les désirer. »  Martin Heidegger

C’est par la pensée que la bonté et de la liberté rejoignent la conscience, une pensée qui s’élabore aussi dans la parole et dans un rapport à l’autre ; et qui accentue notre capacité d’accueil et de don. 
La responsabilité du don dans le travail de création est également accordée à l’autre qui a la possibilité de répondre, de prendre la parole et de faire exister l’œuvre au sein de la rencontre, de lui donner un sens plutôt que de la laisser se perdre dans un non-retour. 
Un don dans lequel la simplicité et la gravité du geste n’échappent pas à la personne qui le reçoit, et lui permettent à la fois de le prendre et de le rendre. 
Une transformation s’opère dans ce processus, à la fois en soi et hors de soi ; le moi cesse d’être un centre impénétrable pour devenir, au contraire, poreux, vidé peu à peu de son étanchéité, de sa résistance à l’autre comme à lui-même. Car le lien avec l’autre est en même temps le signe de la réconciliation de l’artiste avec lui-même, qui dépasse alors ses résistances.
Ainsi l’œuvre de création en tant qu'acte de bonté révélerait la possibilité de cet intérieur/extérieur, proche/lointain dans l’espace vide et plénier de l’atelier, dans la responsabilité et la liberté du moi. Cet espace n’est pas conquis, mais bien abandonné, délivré de la faute, dégagé du dire, ouvert à la singularité et à l’universel.

C’est dans l’irréductibilité de l’amour que la possibilité devient quelque chose de signifiant et que la défaillance apparaît comme bonté.
L’amour, dont le mouvement consiste à ouvrir des possibles, à dé-couvrir des formes, ne se réduit évidemment pas à une suite d’élans affectifs et ne se limite pas non plus à un objet ou à un être ; l’amour appelle la beauté et la signifiance. Appelle l’élégance.

Dans un processus de création, la liberté de l’artiste est liée à l’agir et à l’œuvre.
Ce processus, qui se crée au sein même de l’atelier, provoque divers mouvements, d’amour, de bonté, de doute, de peur qui participent à la liberté de l’artiste et de son œuvre.
La vérité que nous exprimons est l’accomplissement d’une pensée, d’une part de soi abandonnée à cette vérité, à l’essence de la pensée, à l’engagement pris envers soi-même. C’est à partir de cet engagement qu’amour, désir et bonté, par le pouvoir de la pensée, expriment ce qu’Heidegger nomme « la force tranquille du possible » et instaurent « la relation de l’homme à l’Être ».
Et cette relation à l’Être s’inscrit dans le rapport qui nous lie à la nature et à l’art, c’est-à-dire à la part sacrée l’existence.
                       Grand merci à Paul Grégoire pour cette image.