« Je me suis étendue sur les
aiguilles de séquoias et il m’a semblé descendre le canyon dans la fureur et la
confusion d’un cours d’eau, dans un état de bonheur semblable à la naissance
oublieuse du sang et de la déchirure. Trop absorbée par le monde en
mouvement, la Nature fait fi du deuil et, quelle que soit la dévastation qui la
menace, elle accomplit, en un rituel secret, toute sa prédiction. » Elizabeth
Smart
Le
temps, depuis le premier jour, m’est compté. Je vais disparaître sans
savoir où, ni quand ni comment. Les morts ne revivent pas. Ne reviennent pas. Le jour de ma mort, je laisserai une empreinte mémorielle fugace et lente.
Le temps de la vie n’est ni précieux ni exaltant : divin, sacré,
fugace et lent.
Ça s’arrêtera. Mais pas maintenant. J’écris. Suis
tenaillée par la faim. L’écriture se perd, s’achève et recommence. S’inachève. Je suis
une poussière terrestre. Tant que l’Homme ne la détruira pas complètement,
je serai cette planète. J’ai foi dans l’agir. Bâtir une forêt, une
ville. Je suis une fourmi. Une bosseuse.
Je ne sais pas aimer, et je tends les bras. Ne sais pas chanter,
mais ma voix chante. Ne sais pas nager, et traverse des lacs. Je
suis une saltimbanque, une avaleuse de feu, une allumeuse.
J’arpente des villes, splendides, détruites, peuplées d’humains. Je refuse la guerre. Je chante faux. J’écris. C’est dans ces
espaces que je respire.
Il y a de la douleur partout. Dans l’enfance et davantage dans
la vieillesse. Folle vérité.
Je n’enfanterai ni fils ni fille, mais j’aurai fait pousser la
mandragore. Jamais je n’atteindrai l’horizon ; je ne serai
pas sauvée.
Partie des dizaines de fois, sans retour.
Pour survivre, j’ai sucé la moelle des uns et des autres. On m’a
aussi demandé ma part.
Je veux être utile. J’appartiens au temps, dans le vent qui agite
la lumière, la matière, le désir.
Qu’importent
les distances.
Trouverai-je ma part de bonté ? Comme il y a des siècles
quand je savais encore pleurer.
Comprendrai-je l’absence ? Entendrai-je le bruissement de la fourmilière ?
Je n’entretiens pas le leurre du bonheur. Bêtement fidèle, concrète, efficace. Je cherche des accents de vérité.
Les hauts et les bas. Pas besoin d’en faire un drame.
Marcher sur un fil n’est pas si difficile, c’est se retourner le plus périlleux.
Comprendrai-je l’absence ? Entendrai-je le bruissement de la fourmilière ?
Je n’entretiens pas le leurre du bonheur. Bêtement fidèle, concrète, efficace. Je cherche des accents de vérité.
Les hauts et les bas. Pas besoin d’en faire un drame.
Marcher sur un fil n’est pas si difficile, c’est se retourner le plus périlleux.
Merci Paul Grégoire, pour la photo. |
La joie quand elle arrive.
Elle est si belle.