UNE ESTHÉTIQUE DE LA BONTÉ

Chroniques de libres pensées créées à partir d'une citation d'auteur
par Dyane Raymond

mercredi 4 juillet 2012


« Le réel brut ne donnera pas à lui seul du vrai. » Robert Bresson

Pour Carmen
Aucune vérité n’est immuable. Particulièrement dans le processus d’un travail d’écriture où chercher à créer un départage entre vérité et mensonge relève d’un non-sens. L’éthique du texte n’a que faire de ces considérations, somme toute, superficielles. En fait, l’écrivain n’a pas le choix puisqu’il n’est pas possible d’établir une séparation ou même une distance entre écriture et fiction dans une œuvre littéraire. Même les récits autobiographiques ou dits d’autofiction doivent répondre d’une forme et donc d’une manipulation par l’auteur de faits et d'idées qu’illustrent des mots. Il y a certes interpénétration entre l'auteur et le texte ; durant tout le processus d’écriture, celle-ci se tisse de son universalité, de sa perméabilité aux destins humains, aux souffrances, à l’obscur, à l’amour. Et toutes ces choses ne relèvent évidemment ni de la volonté de l'écrivain ni de sa « technique », mais prennent place dans le recueillement et la bonté. Elles sont une matière première dans laquelle l’artiste investit son atelier — son espace vide — et commence à entendre quelque chose, de la musique. 
Cet espace, nu et libre, il n’importe pas de le remplir, mais plutôt de capter les ambiguïtés et les paradoxes qui s’y présentent. C’est dans ce lieu — vide — que l’objet de création révélera son implicite, son indistinct. L’artiste y met son expérience, ses valeurs, sa pensée, comme le fera ultérieurement le lecteur. De part et d’autre, il y aura un abandon, une rupture face à une image spéculaire qui ne renvoie que du moi. Pour que l’œuvre se présente au lecteur comme au créateur, il faut qu’il y ait avant tout une compénétration de perceptions, de lumières, de nudités, de pertes.
Cassures.
La pensée et le texte rayés, libérés de leur voracité, de leur impatience ; en relation avec de l’autre, du dehors ; sans défense. L’atelier devenu un espace de re-construction, en tant que vecteur de risque, que voie ouvrant sur plusieurs pistes, aidant à ériger une forme.
Un texte se bâtit, se solidifie, encore et encore. La tension, la concentration, la bonté forment la spatialité de l’œuvre.
Ces expériences de création, incomplètes et imparfaites toujours, établissent une complicité entre l’écrivain et le lecteur et conservent à l’œuvre son caractère d’inachèvement.

Labyrinthe à ciel ouvert. Le déplacement est obligatoire : l’avancée à l’intérieur.