UNE ESTHÉTIQUE DE LA BONTÉ

Chroniques de libres pensées créées à partir d'une citation d'auteur
par Dyane Raymond

mercredi 11 avril 2012

« Mais l’homme qui est épris de bonté ne saurait mener une vie solitaire ; pourtant, sa vie avec autrui et pour autrui doit essentiellement demeurer sans témoin : il lui manque avant tout la compagnie du moi. » Hannah Arendt

Pour M.
Ma solitude est essentielle. Elle est l’essence de ce que je suis.  De ma pensée, mais aussi de mon corps vivant.  De mon corps en mouvement dans un espace. De mon corps puisant son sang, sa sève jusqu’à épuisement. Dans la pensée. Ce que je suis. Dans la solitude.

Toutefois la solitude est suspecte voire souffrante. Être seul, c’est ne pas vivre avec les autres. On peut se cacher, ça, ça fait du bien. Je pense ici à la maman de l’ami Luc qui se perchait en haut d’un arbre pour se reposer un instant de sa nombreuse marmaille.  Un bien sur-humain. Un isolement qui ravive la bonté.  Une pensée qui se manifeste autrement que dans une contemplation passive. Une vérité d’être qui se révèle dans le geste et la cohérence.

La solitude m’est un mal nécessaire. Elle m’isole. De toi. De moi. Il est faux de croire que la solitude ramène à soi-même. Elle est une exclusion, une expulsion hors du corps amour. Hors du corps de l’œuvre. Le corps est enfermé dans une machine qui voyage dans le temps et le propulse dans un imaginaire sans cœur. À un pas de la déréliction.
Je l’aime. Elle est une ivresse, une drogue dure.
Elle m’éloigne pourtant de la bonté, avec opiniâtreté. Je ne broie pas du noir. Oh non ! Mais les contours de toutes choses deviennent flous et difformes comme des choses mortes.
J’en ai besoin. La dose n’est pas létale. Elle creuse un sillon dans la chair. Elle tente de faire croire que la prière est un acte de recueillement. Mais la prière, le plus souvent, s’égare dans l’affolement. La prière fait jaillir des larmes, qui, elles, le deviennent, assassines. Des larmes qui lacèrent le foie, corrodent l’âme comme un cancer.

« Je veux être bonne. » Quand j’étais petite, c’était un cri du cœur.  Plus tard, la bonté est devenue l’objet d’une intime réflexion que j’ai voulu étendre à tout ce qui me concerne : toi, l’écriture, l’autre, le labeur, la vie la vie.
La solitude me tire du côté des lâches et des traîtres. Je reste là, plantée devant elle comme une idiote.



Être bon